Les fleurs sauvages ne meurent jamais...
Mes chers amis qui me font le plaisir de me suivre depuis si longtemps. Certains près de 20 ans.
Vous savez que je suis poète, chansonnier, et également auteur de deux thrillers (jusqu'à présent) dont une adaptation sur FRANCE 2 est en cours de projet.
Je vous invite à reprendre contact avec cette page, que je réactive officiellement comme support de TOUTES mes écritures.
Bientôt je partagerai d'autres projets avec vous sur ce site.
A très vite, je vous embrasse DAMIEN VERHEE
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C'était un mois de Novembre comme on les aime. La pluie pleurait son désespoir sur toute la ville, n'épargnant rien ni personne. Etienne rentrait du travail. Même
itinéraire, même sale journée. Une fois de plus il venait de rater son bus. L'heure c'est l'heure chez Transpole, on ne transgresse pas avec le règlement. Le bus était encore au feu rouge,
prêt à partir, mais pas encore parti. Et ce chauffeur, triste comme si l'on venait de l'opérer de la rate qui le regardait en lui signifiant qu'il ne pouvait pas ouvrir la porte, le règlement
l'interdit, il voit bien qu'il tombe des sceaux, que le gars le regarde d'un oeil suppliant, mais...Il ne peut pas. Et le bus s'éloigne au vert, et Etienne le regarde s'en aller hagard. Mais,
pourtant au fond de lui, il se doutait bien que ce chauffeur, avec sa tête de rien du tout, ne le prendrait pas au vol. Puisque le suivant est dans 20mn , autant marcher un peu, puis, qu'importe
si le temps est mauvais, il suivra avec son humeur. Il rumine en déambulant, sur cette journée, cette prise de bec avec jocelyne, la nouvelle secrétaire de direction originaire de Lens et qui ne
supporte pas tout ce qui est immatriculé 5-9! C'était à propos des rapports de chiffre d'affaire qu'il n'avait pas rendu avant ; en effet, il faut les compiler pour la réunion de l'après-midi du
Comité de Direction de la boite. Comme cela prend un bon 6h bien tassé, si tu ne l'as pas bossé un peu avant chez toi le dimanche, tu es certain d'être hors créneau. Il était hors créneau,
ayant préféré une ballade en forêt, au dessus de Lille, et ayant perdu du temps en écoutant son i-pode sur un banc en écrivant encore une de ces satanées poésies tristes et plaintives, comme il
en a écrit des centaines depuis le début de sa fin à lui, ce fameux jour où sa vie a foutue le camps. Puis cet e-mail reçu d'un compte Hotmail qu'il ne connaissait pas
indiquant, la semaine dernière sur son mail pro : " Catherine ne s'est pas volatilisée il y a deux ans".......
Cet e-mail l'avait plongé à nouveau, et dans l'incompréhension, et dans cet éternel chagrin qui l'habitait depuis ces deux années. Sa vie se résumait depuis lors à son unique travail, et son site
internet, mausolée poétique dédié à sa belle disparue....
Et la pluie redoublait d'intensité, comme synchronisée sur sa peine qui gonflait.
Deux ans qu'il essayait d'oublier à grands coups de Lexomils, d' Atarax....
Deux ans, et ce mail inconnu...
Rentrer. Vite rentrer et écrire. Contre le mal on a rien inventé de mieux, et grâce à cela rien ne meurt jamais! Du moins pas intégralement.
Etienne rentre enfin chez lui. il est trempé, sa cravate colle sur sa chemise au point qu'on dirait qu'elle n'en soit qu'un motif imprimé. Il est 20h, pile poil.
L'heure du journal sur la deux, car sur la une c'est pour les bobos....Le PSG a perdu....Un attentat en Irak....grève des fonctionnaires demain à prévoir, large ampleur en opposition avec le
projet de législation du gouvernement Sarkozy 6 ( 6è du nom en 9 mois de second mandat!) prévoyant l'allongement de la durée du temps de travail à 80 ans! ......Dans les
faits divers, une femme qui s'est réveillée d'un coma de prés de 18mois, du côté de Marseille, et ....Le CAC 40 qui va mal, dû à une énième flambée des cours du baril du brut.
Etienne allume son PC 13" HP, et réfléchit au texte du jour....il décide d'écrire sur le coma, c'est un peu autobiographique comme thème, mais il excelle dans cette écriture spontanée et noire.
Même s'il se qualifie de poète Sncf, il aime écrire depuis toujours.
Mon amour tu ouvres les yeux
Sur un monde devenu hideux,
Tu avais voulu fuir cette vie
Mais Dieu n'a pas voulu de toi
Les anges t'ont chassé du Paradis
Là-bas, il y faisait trop froid.
Tu es revenue dans notre monde
Un traînée blanche dans le ciel
Ta vie était une poubelle nauséabonde
La mort n'est même plus éternelle!
etc...
Il manque, dans cet atmosphère un peu de Vodka pour agrémenter les cigarettes qui s'enchaînent à une vitesse folle, au rythme des paroles de Romain Humeau. L'ambiance est triste, et habituelle.
C'est dans cet état là qu'il se sentirait presque le mieux. c'est paradoxal, mais c'est ainsi. Il travaille pour ne pas penser à elle, et il pense à elle pour ne pas penser au travail. La vie est
belle.
Encore deux semaines et les vacances arriveront. Il était temps, ces derniers mois furent éprouvant. Cette simple pensée l'alarme, que va t-il faire pendant 10 jours sans travailler, ni même sans
avoir la garde de ses filles?
Tu t'éveilles, le regard sans lueur,
Tu entrouvres enfin les yeux,
Sur ce monde qui te faisait peur
Sur tout ce qui te rendait malheureuse
Tu réalises soudain ton échec,
Quel est ce bouquet sur le meuble en Tek?
Quels sont ces lieux, si étranges...
Où sont donc partis les anges,
Ont-ils été effrayé par mes propos?
Pourquoi n'ai-je plus que la peau sur les os?
Il n'arrive plus à écrire sur un autre sujet. Deux ans que cela dure. C'est comme si sa propre vie s'était éteinte depuis tout ce temps, comme si plus rien n'avait de saveur. Même ses proches ont
baissé les bras. Etienne était un mort parmi les vivants. Cigarettes, Vodka, carnet et crayon graphite...Un antarax de plus, et une vodka pour le faire passer. Il ne respecte pas même sa
personne, et en affaire, il se sert de son amertume pour performer.
L'heure du sommeil approche, les cauchemards de la nuit sont dans les starting-blocks.
Dans la vie rien n'est dû au hasard.
Au moment d'éteindre l'ordinateur, qui lui sert aussi de meilleur ami, retentit l'alerte mail.
Encore un mail étrange et improbable : " Je sais où elle est, je connais sa vie, mais je ne peux pas pour le moment vous en dire davantage".
2
Etienne avait connu l'enfer à la suite de ce drame. Au sein de sa famille, c'était l'incompréhension. Il ne fallait jamais avouer ses faiblesses. Lui, il l'avait
fait. Trois mois de doutes, d'hôpitaux, et de squatte chez sa grande soeur Valentine à Roubaix. Plus rien ne lui importait. Il cherchait à comprendre ce qui avait pu motiver dans l'esprit de
Catherine pour en venir à le tromper, puis rompre sans ne donner plus aucune nouvelle, et sans en prendre de lui. Ils avaient été un tout. Ils n'étaient plus rien. Etienne, était rongé par ce
mal, il devenait son obsession, son sujet de prédilection quand il écrivait sur son site. S'il n'avait pas été aussi faible il aurait bien été tenté de descendre là-bas et de voir ce qui s'y
dérouler. Sans doute sa belle famille avait été complice.
Ils avaient été unis si forts, pourrait-on dire, que la "fin" se devait être extrême, elle aussi. La passion et la haine. La force , la faiblesse. Pas une nouvelle, rien. Il aurait pu crever sur
cette route départementale, rien. Après tant de choses vécues, et quelques épreuves pas faciles, il se croyait devenu invincible, et croyait que son couple l'était lui aussi. A l'abri de ce genre
de scénario. Mais non, il ne valait pas tant que cela dans le coeur de sa belle, et parfois la honte fait faire des choses bien basses.
A l'abri? Aucun couple ne l'est au fond. Nous sommes tous et toutes un jour tentés. Parfois cela se justifie ou, du moins, s'explique, parfois non, et on le fait quand même. Tromper, c'est quand
ça se sait, quand ça ne se sait pas, c'est du piment dans sa vie de couple. On en rit avec les amis, parfois on en discute avec sa meilleure amie, son meilleur copain, un collègue, jusqu'au jour
où cela se découvre, et que des vies basculent.
Ces trois mois furent l'enfer absolu. La dépression avec un D majuscule. Il s'en est fallu de peu pour qu'il finisse par réussir à se suicider.
Il s'était vu refusé le droit d'entrer en hôpital psychiatrique, à la suite pourtant des recommandations d'une cellule de psychiatrie, et aussi, à la demande expresse de quelques uns des
siens. Un lieu qu'il s'efforçait de fréquenter le plus souvent possible. Il lui importait de témoignait au plus grand nombre d'individus du caractère magique de sa relation. Il fallait
que la terre entière puisse savoir qu'un jour il avait connu le Graal en matière de relation amoureuse. La fusion suprême, le bonheur divin et absolu. Mais tout cela au fond n'était que
poussière. Tout lui faisait penser à elle, et la guérison n'était pas facile. S'il croisait une voiture identique, quelqu'un qui porte le même prénom, le même parfum....Tout!
Sur son site il qualifiait cet état de regrets nombreux de "Petite Mort", la mort du coeur en tous les cas. Il ne serait plus jamais pareil après.
Il lui avait fallu ces trois mois de traversée du désert pour que la chance vienne lui sourire enfin un petit peu, et l'aide à se sortir de sa torpeur morbide, dans la quelle il était plongé.
Cette chance c'était " La Française de Bureautique" qui la lui offrait. Enfin une occasion de se sortir du marasme des mauvaises pensées, de la tristesse, du monde du Passé et des souvenirs qui
font mal au ventre, au point que l'on veuille se le déchirer à grands coups de couteau!
Bon d'accord, il ne s'agissait que d'un modeste poste d'acheteur dans cette société qui était structurellement petite, eut- égard à ce qu'il avait connu avant dans la Grande
Distribution.
Mais c'était un bon moyen de ne plus penser en permanence à elle, et de retrouver un peu de dignité humaine, de se concentrer sur autre chose que sur la mort, les médicaments, les idées noires.
Certes, il n'avait pas la meilleure allure, le physique était un peu "fatigué" ; et cela pouvait se comprendre, car, bien que chômeur depuis trois mois il n'avait pas vraiment eu l'occasion
de se reposer des masses. Il ressemblait plus à un fantôme qu'à un gagnant, et en paraître un le jour du dernier entretien d'embauche, le cinquième du nom, avec le Pdg avait été un grand miracle.
Quoiqu'il en soit il était pris. et ses débuts avaient été des plus remarquables, forcément il lui restait encore un peu de cet esprit de gagne dans les veines.